Journal d'un caféïnomane insomniaque
vendredi mars 29th 2024

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P. 507 – Philippe Rubempré (coquetterie)

Cette histoire commence avec un simple cliché trouvé au hasard d’une de mes nombreuses lectures. Ayant besoin d’évasion, il me prit d’attaquer les quelques deux mille pages de la trilogie sudiste de Julien Green, noble académicien que je n’avais pas l’heur d’avoir déjà lu. Comme je palpai l’objet entre mes mains, le tournant et le retournant, l’examinant sous toutes ses coutures après en avoir dévoré le synopsis, cherchant si quelques lignes biographiques complèteraient d’une manière encourageante la maigre notice que je possédai quant à son auteur, je remarquai quelque papier ou carton en guise de signet. Curieux, je fis défiler les pages, la tranche du livre implorant les cieux, jusqu’à ce que l’intrus vienne s’échouer sur le sofa. Un cliché, oh surprise ! Une simple photographie en couleur, d’une composition fort simple, la moitié basse du cadre, savane au coeur de laquelle je distinguai deux êtres, étant séparée d’un ciel fumée de cigarette par une ligne d’arbres à l’horizon. Seule ligne verticale au quart gauche de la photographie un palmier tutoyant l’Etre suprême. Oubliée là par qui ? Je me souviens à présent avoir acquis cet ouvrage d’occasion, un bouquiniste d’une petite ville de province du Nord de la France. Ce souvenir rend le cliché d’autant plus intriguant, c’est un paysage caractéristique de l’Afrique orientale, une réclame pour le safari, Visit Kenya with your Massaï. De fait l’action appelle immédiatement une chasse au lion, les deux chasseurs sont de dos et avancent, la démarche prudente, le colonial (s’il n’en est pas un, le touriste y ressemble à s’y méprendre) à une distance respectueuse de son guide.

A quelque temps de là Aude m’invita à goûter la cuisine Taj Mahal du restaurant éponyme en compagnie d’un Colombien, de deux mères, d’une Marie-Laure et du plus irradieux des sourires que j’eus à contempler dans ma carrière de dandy faussement don juan. C’est l’Elisabeth de JG, celle-là même qui me séduisit dès l’incipit et ne me lâche encor pas. Il me faut la revoir c’est vital et pourtant de toutes les charmantes de ma compagnie d’un soir elle est la seule – est-ce un hasard ? – dont le prénom m’ait échappé sournoisement désarçonné par ce Sourire majuscule que je salue en minuscule. La cuisine était succulente, nos hôtes colbertistes bien qu’en échange d’une note d’un millier de pistoles ils nous offrirent apéritif, digestif et force bonne soirée merci revenez chez nous et consommez mes frères consommez !

Le lien avec la photo n’est pas, je vous le concède bien volontiers, évident ; sauf à considérer que le safari, si c’est bien de cela dont il s’agit, se déroule à l’orée du désert du Thar, et que notre pseudo Massaï n’est en réalité qu’un vieux sherpa indien brûlé par de longues années d’exposition au soleil brûlant et nu du sous-continent. De fait la chasse au lion se métamorphose en chasse au tigre, et même si cela ne vous semble pas crédible il faut pourtant que cela soit croyable, sinon quid du pouvoir des mots et des lettres ? O fortunatos nimium sua si bona norint agricolas ! comme l’aurait dit Triple-Patte citant le défunt Virgile…

Une photo intrigante plus un sourire désarmant – et désarmé – voilà ce qui fait l’intrigue de cette histoire. Bien peu me direz-vous, mais n’est-ce pas là le propre de l’exercice que de laissez à notre lecteur perdu et admiratif le plaisir incommensurable de laisser son vague-à-l’âme et son imagination écrire cette nouvelle ? Et c’est la nouvelle qui décrochera tous les prix, toutes les récompenses, une immense supercherie. En lisant ces quelques vers en prose vous êtes l’écrivain qui compose cette nouvelle, vous en contemplez le verbe et la déclinaison, l’accentuation et la conjugaison, la rime et le cru millésimé… O lecteur, que les muses t’inspirent la nouvelle la plus exquise qui soit, envoûtée du charme des mille et une nuits d’un sultan chamarré à la feuille de rose, que sans les cent dix pilules il te soit accordé de fantasmer ton rêve coloré, pourpre cardinalice, sinople flamboyant, à la croix de sable sur un fond d’or digne d’un connétable en bataille pour son Georges !

Eprouvez la langue, qu’elle soit de Chrétien de Troyes ou de Saladin, de Goethe ou de Cervantes, de Scott ou de Saikaku, de Manguel ou de… Tiens de Manguel, Alberto c’est bien. Il nous fait rêver en lisant, c’est à noter, c’est assez rare chez un écrivant, je devrais dire chez un écrivain, un qui de ses lectures extrait un roman des plus passionnants qui soient, le roman des livres, le roman de la littérature, le roman de la lecture, le ROMAN DE LA VIE !

Notre Massaï du Thar et son touriste avancent, le souvenir du sourire irradieux s’éloigne. Le temps ne fait rien à l’affaire… Au loin, le soleil couchant. The poor lonesome tourist safarise, son amour se gargarise des attentions d’un autre, loin, loin, loin de Paris est son mari. Qui va à la chasse perd sa place dit le dicton populaire. Que va trouver le compagnon en rentrant dans sa maison ? Sa femme et son amant, un de plus. La polyandrie est naturelle autant que la polygamie. Il l’a bien compris, n’en déplaise à sa jalousie.

Tout ça pour dire qu’un touriste et son guide progressent dans la nature, et que l’histoire est le fruit de l’imagination du lecteur…

E pour Eden – Olivier Messager (nouvelle)

L’année qui touchait à sa fin n’avait été ni calme ni sereine.
L’on y avait connu séismes, grandes tribulations politico-financières, désordres et désastres écologiques désormais coutumiers, et l’atome -que l’on croyait pourtant domestiqué- s’était brutalement octroyé sa part du chaos global dans quelque lointain archipel.

Au sein de la vieille Europe, tous les pouvoirs en place faisaient entendre une même litanie selon laquelle ils allaient trouver des solutions, résoudre les problèmes, dussent-ils en passer par des mesures draconiennes afin de relancer l’économie et la « bonne marche des affaires ». La plupart des grands médias relayaient pieusement ce discours, tout en déversant avec une pareille constance des révélations sur de nouveaux scandales mêlant argent, pouvoir et corruption au plus haut niveau.

L’Europe était sur le point de devenir une sorte de Babylone 2.0, une machine protéiforme, aveugle et agitée de soubresauts qui n’auguraient rien de bon pour les temps à venir. Certains de ses dirigeants avaient atteint un tel degré dans le grotesque et le vulgaire que l’on aurait pu les imaginer ligués en secret dans l’élaboration de quelque gigantesque farce, visages grimaçants d’une décadence nouvelle.

Dans chacun des pays membres émergeaient divers mouvements de protestation, les uns fomentés par certains groupuscules extrémistes ayant flairé l’odeur du sang, d’autres se voulant l’expression d’une citoyenneté au sens noble, en refusant toute étiquette politique.

Partout grandissait un sentiment d’exaspération et de fureur.
A travers toutes les strates sociales, l’on voyait se dessiner des zébrures,
signes d’une tension jusqu’alors inégalée.

Dans cette atmosphère de déliquescence, la vie continuait tant bien que mal. Certains, de par leur situation, étaient plus rudement touchés que d’autres, et la précarité engraissait chaque jour.

Dans une grande ville de France se préparait alors une Biennale de l’art contemporain. Comme à l’accoutumée, l’approche de cet évènement engendrait à travers la presse et l’internet une glose spécifique, criblée de références et de postulats sur la force de l’art et son rôle au sein du monde actuel.
Cette grand-messe artistique se targuait « d’interroger le réel », concept des plus habiles car suffisamment imprécis pour que l’on puisse lui prêter, selon la position discursive choisie, autant de profondeur que de vacuité. Les discours et autres joutes verbales allaient donc bon train, et faisaient le sel de nombreux dîners en ville, bien en amont de l’ouverture de ladite biennale.

Certains critiquaient son existence même, soulevant le doute envers la pertinence d’un tel évènement alors même que le monde occidental semblait prêt à partir en lambeaux. D’autres affirmaient haut et fort que jamais encore ne s’était trouvé moment plus opportun pour offrir une tribune à un panel des plus grands artistes internationaux.

L’art était un miroir.

Un exutoire.

Un anachronisme.

Une pure escroquerie.

Les points de vue les plus opposés étaient exposés de vive voix ou par écrit. Les esprits s’enflammaient, certains trouvant dans cette occasion un enthousiasme renouvelé, voire un moyen de s’évader, loin des hasards du quotidien, comme pour défendre un idéal.

Le microcosme concerné par les préparatifs de la biennale bruissait de mille rumeurs. Impatient et fébrile, il oeuvrait aux derniers préparatifs en voyant se rapprocher la date de l’ouverture.

Les artistes invités à la Biennale devaient venir des quatre coins du monde. De nouvelles figures censées incarner la modernité. Valeurs montantes sur le marché de l’art, dernières fantaisies découvertes par tel richissime mécène ou oligarque, personnalités outrageusement excentriques ou d’une timidité maladive, la Biennale promettait d’être richement bariolée.

Parmi les noms les plus attendus se détachait celui d’Alexandre Zerlevski.
Jouant d’un anonymat jusqu’alors savamment préservé, ce personnage était devenu au fil des années l’un des plus sérieux prétendants au titre de nouvelle star mondiale du genre, et nombreux étaient déjà ceux qui enquêtaient sur lui, rédigeant son hagiographie en le qualifiant de mutant hybride de Warhol et de Jérôme Bosch, de « nouvel Icare pour un début de siècle » ou autre laïus plus ou moins inspiré.

Zerlevski, il va sans dire, ne laissait guère de public indifférent dans son sillage. Ses actions-performances étaient la plupart du temps mises en scène avec la sècheresse d’un coup de fouet. Elles se caractérisaient en général par une certaine violence, tant dans le propos que dans la forme choisie.

Tous ceux qui avaient assisté à la dernière Biennale de Venise pouvaient en témoigner : l’œuvre présentée par Zerlevski s’intitulait Babel/Gomorrhe proce$$, et consistait en une tour de 5 mètres de diamètre sur 10 mètres de hauteur. Sa construction avait nécessité l’emploi de roches rares ainsi que de métaux précieux : l’argent y voisinait avec le basalte ou le marbre en diverses strates dont la réalisation confinait au mystère. Des sons étranges, certains perçants, d’autres étouffés, s’échappaient de la tour, dessinant dans l’air comme des volutes sonores, en des langues non répertoriées.

En haut de la tour gisait sur le flanc un veau d’or. Le corps de la bête présentait des attributs mâles autant que femelles, et elle semblait respirer lentement, comme plongée dans un profond sommeil.
Régulièrement apparaissaient en haut de la tour deux créatures d’aspect humanoïde, articulées par l’on ne savait quel mécanisme, qui se mettaient alors à ramper sur le sol pour venir téter l’animal. Amplifiés, leurs bruits de succion venaient se mélanger à la glossolalie ambiante, suscitant chez de nombreux spectateurs un vague sentiment de malaise mêlé de fascination.

L’oeuvre avait été estimée par plusieurs spécialistes à trente-cinq millions d’euros. Le crâne de Damien Hirst était désormais battu à plate couture.
Pourtant, nul ne savait d’où Zerlevski tirait ses financements. Dans le même ordre d’idées, sa stratégie de communication était bien dans l’air du temps : nul ne connaissait son visage. Personne ne disposait d’informations sur son parcours. Les seules paroles attribuées à l’artiste prenaient la forme de haïkaï ou d’aphorismes sporadiquement livrés via Twitter ou Facebook.

La plus célèbre d’entres-elles était celle-ci :

JE NE SUIS PAS VOTRE NOUVEAU DIVERTISSEMENT
(posté le 9 septembre 2009 à 9 heures du matin).

Une autre fois, de façon d’autant plus saisissante qu’elle n’était aucunement associée à une Biennale ou autre manifestation culturelle, se déroula en Allemagne une performance qui fut aux dires des critiques un point de non-retour dans la carrière de l’artiste. Cet évènement eu lieu peu après le début de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler « la crise financière de 2008 ».

La performance (intitulée à posteriori « Zeitgeist/Chaos » via un canal YouTube) débuta dès l’aube du premier jour de l’année deux mille neuf. Les préparatifs qu’elle nécessita demeurent encore aujourd’hui un mystère. De toute évidence, ils eurent lieu pendant une majeure partie de la nuit, dans une discrétion exemplaire. Nul ne sait combien de personnes furent nécessaires à son élaboration, ni de quelle façon ils procédèrent.

Toujours est-il que ce matin-là, les habitants les plus matinaux d’une des plus grandes villes de Bavière furent les premiers témoins d’une scène qui allait entrer dans l’histoire : sur le parvis de la plus grande banque de la ville étaient installés une centaine de personnages. Tous étaient vêtus à l’identique d’un costume trois pièces anthracite. Les pieds nus, ils arboraient tous une même expression hébétée ainsi qu’un tatouage sur le front, qui mélangeait en un même symbole celui de l’euro et une svastika. Leurs nuques étaient également marquées d’un code-barres.

De leurs bouches sortait une étrange logorrhée, égrenant en sept langues différentes des résultats boursiers sur le ton de la psalmodie, pendant que leurs corps effectuaient tout au long de la journée les mêmes gestes de prière, avec génuflexions, mains jointes puis face contre terre. Au fur et à mesure que les heures passaient, tous ceux qui assistèrent médusés à ce phénomène purent les voir fondre graduellement, se desquamer puis, lorsqu’ils furent réduits à l’état de squelettes, prendre feu pour enfin finir par tomber en cendres.

Le procédé de fabrication et l’animation des personnages (robots/mannequins/artefacts ?) sont encore à ce jour des points non élucidés, malgré les nombreuses conjectures à leur propos.

A l’emplacement de la performance, une foule s’était massée. Commerçants, ouvriers, étudiants autant que forces de l’ordre demeurèrent immobiles pendant des heures, comme hypnotisés par ce qui se déroulait devant eux.

La ville entière fut comme frappée de stupeur, à un tel point qu’il fallut une semaine entière avant qu’elle ne retourne à un rythme d’activité normal.

Dans la semaine qui suivit l’évènement, diverses hypothèses scientifiques virent le jour, toutes proposant une explication quand au pouvoir de fascination émanant de l’œuvre de Zerlevski. Certains avançaient l’idée que l’artiste avait pu faire usage d’un gaz de type neurotoxique agissant sur certaines zones du cerveau, d’autres soutenaient qu’il s’agissait de suggestion subliminale par le biais de symboles habilement dissimulés.

Suite à cette performance, le nom d’Alexandre Zerlevski fut comme jeté à la face du monde. D’artiste pour le moins coté sur le marché de l’art, il devint une référence, une nouvelle icône des temps prétendument modernes. Les légendes à son sujet fleurirent de toutes parts, les spéculations les plus invraisemblables devinrent chair à médias, et l’on vit même naître ça et là des embryons de cultes revendiquant son influence.

Quelques-uns prétendaient que Zerlevski était en fait un agent d’Al-Qaïda travaillant à dynamiter les fondations de l’identité européenne ( !) en s’attaquant à la culture, répandant ses théories et symboles tel un agent pathogène.

Pour d’autres, il était un créateur d’un tout nouveau genre, une sorte de Prométhée moderne, et travaillait avec des généticiens afin de créer une fusion inédite entre l’art et la vie végétale ou animale.

Avant tout, il demeurait une énigme.

L’annonce de la seule présence de Zerlevski à la Biennale se répandit comme une traînée de poudre. Certains l’avaient déjà élevé au statut de guide, voire de prophète, et aux quatre coins du monde se préparait un quasi-pèlerinage.

Des mouvements de protestation téléguidés par des religieux intégristes comptaient bien évidemment se faire entendre à cette occasion. Comme d’habitude, ceux-ci étaient intimement liés à des activistes politiques issu de quelque frange extrême, toujours prompts à dégainer un discours formaté sur la « décadence de l’art » et le « caractère obscène » de certaines œuvres.

La performance exclusive de l’artiste était prévue le 11 novembre 2011 à 11 heures du matin. Elle devait se dérouler dans la plus grande salle de la Biennale, qui à elle seule pouvait accueillir plus de trois mille spectateurs.

Devant l’affluence suscitée par cet évènement, les autorités avaient ordonné le déploiement de plusieurs garnisons de CRS, afin de parer à toute éventualité, et compte tenu du caractère totalement imprévisible des réalisations de Zerlevski.

Dans le programme de la Biennale, un titre avait été annoncé.
A nouveau, celui-ci était pour le moins sybillin :

K@os pῼetry∕∑den ??

Le jour venu, plus de deux mille personnes ne purent entrer dans la salle, et les forces de l’ordre réprimèrent à grand peine un début d’émeute, tant l’atmosphère était électrique. Les portes de la salle durent rester ouvertes pour permettre à tous ceux qui n’avaient pu entrer d’au moins ressentir la rumeur, l’émotion dégagée par la création.

Sur scène se dressait une forme hautaine, recouverte d’un immense velours rouge. Peu à peu se fit dans l’assistance un silence que l’on aurait pu qualifier de religieux. Apparût alors juste devant l’œuvre dissimulée un homme au visage recouvert d’un masque biface, dans lequel certains virent une évocation de Janus.

L’homme tira sur une corde attachée au rideau de velours, dévoilant l’œuvre. Il s’agissait d’une peinture, un triptyque évoquant celui de Jérôme Bosch, où l’on pouvait deviner des évocations de l’enfer, du paradis et du purgatoire. Les paysages représentés donnaient une telle impression de vie que l’on avait l’impression de voir des créatures indistinctes bouger à l’intérieur.

C’est alors que l’homme lança en l’air un dé d’une taille inhabituelle.
Aux dires de certains spectateurs, celui-ci retomba sur une face arborant la lettre E. Ce fut à ce moment précis que la peinture sortit littéralement du tableau et dévora la ville toute entière. Là où se dressaient fièrement les immeubles poussa en quelques instants la forêt primaire d’un nouvel eden. Dans le périmètre de la ville, toute marque de civilisation avait purement et simplement cessé d’être.

Une terrible beauté était née.

Mr – Emma Becker

Pour une fois qu’un roman érotique se distingue par la qualité de sa plume, ne boudons pas notre plaisir ! D’autant plus que ce texte, probablement autobiographique, est un texte de fond, sans mauvais jeu de mots. Passons sur ce qui relève de la lecture à une main (tout en redisant que l’écriture est remarquable, à tout point de vue), qui ne constitue pas, aussi étrange que cela puisse paraître pour un livre publié dans une collection intitulée « Roman X », la majorité ni l’essentiel du texte.

Ce roman s’avère surprenant par sa profondeur, par la complexité toute balzacienne de ses personnages et par l’étude minutieuse de leurs relations ; sexuelles certes, mais surtout sociales, sociétales, politiques (au sens grec du terme). Ceci danse autour du couple central de cette histoire, Ellie et Monsieur, caractérisé par son illégitimité et son hétérodoxie.

Vous aurez donc compris que ce livre est bien plus qu’un simple roman érotique. Il est érotique par nécessité, non par finalité. Il constitue donc une curiosité dans laquelle certaines femmes se reconnaîtront peut-être ; certains hommes également ; d’autres envieront les caractères et situations décrits. sans doute pour un lecteur masculin est-ce un clé pour comprendre que la féminité reste un mystère délicieux, amené à le rester tant qu’il restera secret…

Jeronimus – Dabitch & Pendanx

Est-ce la mort de son nouveau-né de la syphilis qui a déterminé le tragique destin de Jeronimus Cornelisz ? Est-ce la nourrice ou sa femme qui a transmis l’infamante maladie à son fils ? Les clients ont déserté l’échoppe ; la vie conjugale est devenue impossible ; le bébé n’a pas survécu. Fuir pour une nouvelle vie. Repartir de zéro. Reconstruire tout, pas à pas ; pierre après pierre. Embarquement vers l’inconnu à bord du Batavia de la compagnie hollandaise des Indes orientales.

C’est loin de tout, au milieu des océans, que le destin va basculer et s’emparer de Jeronimus… C’est ce destin qui nous est conté par Christophe Dabitch et peint par Jean-Denis Pendanx. Un roman graphique. Une histoire graphique. Le fait divers est historique. Un dessin et des couleurs qui rappellent Vermeer et Rembrandt. Une écriture à la hauteur. Tout est là. À commencer par la question posée par l’aventure de ce petit apothicaire…

Qu’est-ce qui fait basculer le destin ? Comment la nature d’un homme peut-elle évoluer si tragiquement ? Qu’est-ce qui pousse à commettre l’irréparable ?

Ce qui fait de cet ouvrage une oeuvre littéraire réside dans le fait qu’il ne prétend pas apporter de réponse manufacturée. Et le lecteur de s’interroger, dans une situation de même nature…

Ab hinc… 72

« Gaver d’optimisme un monde désespéré est une besogne vraiment peu honorable pour personne » – Georges Bernanos

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