« On ne peut toujours pas publier sans trier ou masquer, sous peine d’être condamné. Les dommages-intérêts sont le visage moderne de l’inquisition.
Ce qui laisse le plus songeur dans cette censure modernisée est l’abandon progressif de nombreuses zones, de l’humour au roman, du pamphlet au livret d’opéra, qui sont désormais judiciarisées.
Il faut se pencher, par exemple, sur le comportement des personnages de fiction, forcément exemplaires. Là se niche la véritable trouvaille du censeur à la page. Ce n’est plus la débauche en tant que telle qui est jugée, ce n’est plus la connotation raciste du littérateur qui est désignée à l’opprobre. Les personnages sont les vrais coupables. »
Emmanuel Pierrat, Liberté sans expression ? Jusqu’où peut-on tout dire, écrire, dessiner, Flammarion, 2015.