Journal d'un caféïnomane insomniaque
jeudi décembre 5th 2024

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L’internat féminin et autres contes coquins – Magnus

Magnus, alias Roberto Raviola, est un auteur de bande-dessinée italien, spécialiste des fumetti neri (Satanik), de leur parodie (Alan Ford) et maître de l’érotisme (avec son chef d’oeuvre Les 110 pilules adapté du Jing Ping Mei, classique érotique chinois). Par ailleurs, Magnus travaille en noir et blanc exclusivement, et maîtrise à merveille cette technique. Il lui offre le meilleur de sa plume et elle le lui rend bien.

Ici les éditions Delcourt rééditent en format original et en version intégrale quatre contes coquins adaptés et dessinés par Magnus. Les trois premiers sont des contes moyenâgeux, Dix chevaliers pour un magicien, Minuit de Mort, et Le crâne vivant. On y retrouve princesses et sorcières, des rois et des chevaliers servants, des malédictions et des fins heureuses. Le dernier conte, L’internat féminin, se passe aux États-Unis dans les années 1950 ou 1960. Il relève du roman noir, rappelle à certains égards Ed McBain. Toutes ces histoires sont coquines, mais chez Magnus, le fumetto ne se lit pas à une main (de préférence la gauche).

Les scenarii de Magnus ne sont pas prétextes à jeter des scènes pornographiques en pâture. Ils sont cohérents de bout en bout (si je puis dire). Le langage érotique y est à sa place, il n’en fait pas étalage inutilement. Pas de vulgarité ici. De même les scènes érotiques, magnifiées par le dessin noir et blanc de Magnus, ne sont pas de simples images alléchantes destinées à faire bander le chaland. Elles sont car elles doivent être. Elles appartiennent intégralement aux histoires, qui sans elles seraient bancales, incohérentes. Et comme pour la langue, le dessin érotique est à sa place, ni plus ni moins.

Pour les scènes érotiques, Magnus ne se cache pas derrière son petit doigt. Le dessin est cru et élégant. Si un gland ou une chatte ouverte doivent être montrés, ils le sont. De même, nous retrouvons dans certains récits et si l’histoire le commande, des scènes homosexuelles. J’insiste sur l’élégance et la précision du dessin de Magnus, qui sait être d’un réalisme noir dans L’internat féminin ou « à gros nez » dans Dix chevaliers pour un magicien, s’adaptant ainsi à la nature du récit. Et son dessin est toujours sublimé par sa maîtrise du noir et blanc.

Voilà, si vous décidez d’entreprendre le voyage, vous affronterez un méchant magicien pour délivrer une princesse (Dix chevaliers pour un magicien) ; vous assisterez au désespoir d’un couple hanté par une malédiction venue du Moyen-Âge (Minuit de Mort) ; et vous comprendrez peut-être à vos dépens qu’il n’est jamais bon de s’en prendre à la petite fille d’une sorcière (Le crâne vivant). Enfin, vous retournerez à l’école surveiller l’étrange nouveau médecin du pensionnat de jeunes filles.

Bonne lecture, et plus si affinités…

Chronique à retrouver sur le Salon Littéraire.