Journal d'un caféïnomane insomniaque
jeudi novembre 21st 2024

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L’alcool et la nostalgie – Mathias Énard

L’amitié, l’amour, la mort. Voilà ce dont il est question dans ce court roman signé Mathias Énard, adapté d’un feuilleton radiophonique écrit par l’auteur pour France Culture. L’amitié, l’amour, la mort. Donc la Vie, avec un V majuscule ; la Glorieuse, façon Ve de Beethoven. L’amitié, l’amour, la mort. La Littérature donc. Tout part de là ; tout passe par là ; tout revient là.

L_alcool_et_la_nostalgie_large    Amour de Mathias pour Jeanne, de Jeanne pour Vladimir. Rivalité, méfiance originelle métamorphosée en Amitié indéfectible entre Mathias et Vladimir, Volodia. Vrai faux ménage à trois à Moscou. Un an d’excès, de folies, d’alcool et d’héroïne, une année hors du temps. Retour au réel, départ de Mathias, revenu à Paris. Ce roman s’ouvre par son retour en Russie à la suite du funeste appel de Jeanne. Volodia est mort. Malaise à l’idée de se revoir. Tristesse infinie de l’amitié morte faute d’ami vivant. Reste à Mathias à accompagner une dernière fois Volodia de Moscou à Novossibirsk, en Sibérie et en train. Jeanne s’oublie dans les caves moscovites en se suspendant à des esses plantées dans son dos, à même la chair. Douleur. Oubli. Nostalgie. Alcool. Miracle de la vodka.

Ce voyage empreint d’alcool et de nostalgie vaut le détour. Nouvelle plongée aux tréfonds de l’âme humaine pour Mathias Énard, après avoir exploré les arcanes du cerveau de Francis Servain Mirkovic dans le remarquable Zone. La plume de Mathias Énard vogue au fil des verstes et de la pensée, presque insensible mais bien là. Il y a fort à parier que ce bateau vous ramène à votre propre histoire, qu’il réveille la nostalgie qui sommeille en vous. À déguster avec une bouteille de bonne vodka frappée.

Le roman s’ouvre sur une citation d’Anton Tchekov, je la reprends en partie en guise de conclusion à cette chronique :

« Cette fameuse âme russe n’existe pas. Les seules choses tangibles en sont l’alcool, la nostalgie et le goût pour les courses de chevaux.« 

Retrouvez cette chronique sur le Salon Littéraire.