Ab hinc… 257
« Il n’y a plus de honte maintenant à cela : l’hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour des vertus. Le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer aujourd’hui, et la profession d’hypocrite a de merveilleux avantages. C’est un art de qui l’imposture est toujours respectée ; et quoiqu’on la découvre, on n’ose rien dire contre elle. Tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement ; mais l’hypocrisie est un vice privilégié, qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d’une impunité souveraine. » – Molière, Dom Juan, V, 2.
Ab hinc… 256
« Rien, il n’y a plus rien, les mots s’enfuient
Je ne rattrape plus les étoiles dans la nuit
Les pages restent vides sans mon ennui
La lassitude a tué mes envies
Je meurs, je vais m’écraser sur le sol
Et mourir simplement, comme un homme
Il aura été bien inutile, mon vol
Comme une vie noyée dans du rhum
Tout est éphémère c’est la grande loi
Rien n’y résiste, pas même les rois
La plus grande poésie est un souffle
Que l’oiseau transporte quand il souffre. »
Pont de Veyle, Expressions pervers
Ab hinc… 255
« Apprendre à penser, à réfléchir, à être précis, à peser les termes de son discours, à échanger les concepts, à écouter l’autre, c’est être capable de dialoguer, c’est le seul moyen d’endiguer la violence effrayante qui monte autour de nous. La parole est le rempart contre la bestialité. Quand on ne sait pas, quand on ne peut pas s’exprimer, quand on ne manie que de vagues approximations, comme beaucoup de jeunes de nos jours, quand la parole n’est pas suffisante pour être entendue, pas assez élaborée parce que la pensée est confuse et embrouillée, il ne reste que les poings, les coups, la violence fruste, stupide, aveugle. » – Jacqueline de Romilly
Ab hinc… 254
« Vous défiliez, les poings serrés, levés. J’allais au café. Je vous regardais traîner des pieds sous les banderoles, d’un pas lourd (la théorie n’incite guère au sprint). Des 10/18 amochés dépassait de la poche de vos duffle-coats. Vous aviez lu Marx, Lénine, Marcuse, ces noms qui ne disent plus grand-chose à personne. J’avais autre chose à faire. Je préférais boire à votre santé un whisky tassé, sans glace pour une fois, fidèlement, à l’écossaise. Vous en auriez eu bien besoin. Vous vous y êtes mis, depuis, avec un métro de retard, comme toujours. Pour nous, le whisky était le supplément indispensable, un accessoire de la panoplie, un cadeau qui n’attendait pas Noël. C’était un truc, nous en parlions tout le temps. Le whisky était la pour la couleur, le clin d’oeil. C’était presque de la récitation, un morceau d’anthologie. Chez quel auteur suis-je quand je trempe mes lèvres délicates dans ce verre où tintent les glaçons ? Frank ? Fitzgerald ? Drieu ? Blondin ? On était entre nous, de la bonne compagnie, du personnel choisi, trié sur le volet, d’un commerce exquis, stylé. Ce liquide ambré convenait aux intérieurs l’hiver, aux feux de cheminée, aux rues tranquilles du VIIe arrondissement où il ne se passe jamais rien – le VIIe, c’est le dimanche des arrondissements. » – Eric Neuhoff, Un Triomphe.
Lectures avril
- Vladivostok. Neiges et moussons – Cédric Gras
- Brassens, l’ami – Mario Poletti
- Lettres de l’Atlantide – Robert Silverberg
- Oh Giovanna ! – Giovanna Casotto
- Giovanna Si ! – Giovanna Casotto
- Histoire de Rome – Theodor Mommsen
- Julip – Jim Harrison
- Poèmes saturniens – Paul Verlaine
- Les onze mille verges – Guillaume Apollinaire
- De l’urgence d’être conservateur – Roger Scruton
- La tragédie du Viking – Georges Tiffany
- Les exploits d’un jeune don juan – Apollinaire/Pichard
- Sophisticated ladies – Paula Meadows
- Fêtes galantes – Paul Verlaine




