Journal d'un caféïnomane insomniaque
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Thomas Morales est Monsieur Nostalgie

Chronique mise à jour le 25/06/2023.

Les temps sont moroses, hélas, et nous avons lu beaucoup de livres*. Le vieil adage de Montesquieu** quant à la lecture dissipant le chagrin est toujours d’actualité… Surtout en ce printemps finissant, présageant un été caniculaire, inondé de nouvelles politiques, sociales, culturelles, internationales des plus affligeantes ! Alors on se prend au hasard d’une rêverie, dans un instant d’égarement, à songer à l’enfance, aux rires, à l’innocence, aux jeux, à notre jeunesse et aux premières amours… Ne l’entendez-vous point sourdre ? La nostalgie… Elle a mauvaise réputation, cette fameuse nostalgie. Les braves gens n’aiment pas que l’on suive une autre route que celle du progrès forcément progressiste, inclusif et ouvert aux quatre vents. Et pourtant…

Thomas Morales est un écrivain, un artisan de la forme courte, excellant dans l’art de la chronique, osant le polar, seul ou accompagné, furetant au gré de ses envies entre voitures et artistes de légende. Un « prince de la nostalgie », avais-je noté en commentant le cru 2018 de ses chroniques, Tais-toi quand tu écris. Le voilà de retour avec ce qui est sans doute son œuvre la plus personnelle, Monsieur Nostalgie, un essai à paraître à partir du 8 juin aux éditions Héliopoles. Morales nous invite dans sa villa de papier à partager un sacré gueuleton en compagnie des fantômes bien vivants – et même bons vivants – de sa langue (Audiard, Conchon, San-Antonio…) ; au fil de sa province ; au cœur de son Paris (qui, est-il besoin de le préciser, n’a rien à voir avec le Paris bobo-écolo-arrogant d’Anne Hidalgo) ; dans sa brocante, en 103 Peugeot ou en solex ; au cinéma, en compagnie de Marielle, Noiret, de Broca, j’en passe et des meilleurs ; dans sa télévision, une télévision digne de ce nom, d’une époque où elle se faisait un devoir d’informer, d’instruire et de divertir ; et enfin, à une balade au gré de son humeur. Avec son style propre, ce hussard aux mots choisis et à la phrase ciselée s’aventure au cœur de la nostalgie et l’élève au rang d’art.

Avec ce nouveau livre, Thomas Morales offre à la nostalgie des lettres de noblesse. On ne dira plus qu’il s’agit d’un sentiment triste, d’un état d’âme de faible, de raté, de perdant. La nostalgie Morales éclaire nos cœurs d’une douce lumière dans les ténèbres quotidiens ; elle aide le lecteur à tenir bon.

Au volant d’une Renault 4L, en compagnie d’Alphonse Boudard ou d’un verre de sancerre, de Paris en province, il faut le reconnaître, Thomas Morales mérite son surnom de Monsieur Nostalgie.

*Nous remercions Stéphane Mallarmé pour son (involontaire) et néanmoins précieuse collaboration.

** « Je n’ai jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture n’ait dissipé. », Montesquieu, Pensées diverses.

Philippe Rubempré

Thomas Morales, Monsieur Nostalgie, Éditions Héliopoles, juin 2023, 185 p.