L’île au trésor – Pierre Pelot
Hommage du prolifique et éclectique Pierre Pelot au maître écossais du roman d’aventures Robert-Louis Stevenson. Nous retrouvons le jeune Jim Hawkins sur une île touristique au large du Brésil, chasseur à ses heures perdues pour le Barrocco, hôtel tenu par sa tante Sally-Sea et le compagnon de celle-ci, Trelaway. À la différence du roman de Stevenson, celui de Pelot est situé au XXIème Siècle, après un accident climatique, cette montée du niveau des eaux qu’on attendait ni si tôt, ni si rapide, et qui a remodelé la surface du globe d’une manière surprenante et encore imparfaitement connue.
C’est dans ce contexte qu’un soir de tempête tropicale le capitaine Billy Bones débarque et s’écroule littéralement dans le hall d’entrée du Barrocco. Jim se lie d’affection avec cet étrange énergumène qui ne sort de sa chambre quasiment que pour se payer des muflées phénoménales ! L’air perpétuellement préoccupé, Billy Bones semble redouter quelque chose… ou quelqu’un, ce que confirme la visite d’un hurluberlu louche d’aspect. Comme chez Stevenson, Bones, lieutenant du terrible capitaine Flint, détient une carte – ici, quelques documents oubliés sur un antique téléphone portable – indiquant le lieu où est planqué le butin du pirate. Sauf que la topographie a changé entretemps. Jim, sa tante et Trelaway embarquent à bord de l’Hispaniola, commandée par un certain Silver, en quête de l’île où est enterré le fameux trésor…
En reprenant la trame de L’île au trésor et en situant l’action dans un monde post-climatique, Pierre Pelot relève la gageure et réussit à redonner un coup de fouet à cette histoire qui a bercé la jeunesse de tant de générations. L’auteur a su conserver quelques repères stevensoniens, ainsi les personnages de Jim Hawkins ou de Silver, ou le bateau Hispaniola, sans commettre pour autant un simple copié-collé futuriste du roman originel. Au petit jeu de l’hommage, Pierre Pelot se montre grand, et offre de nouvelles lettres de noblesse au roman d’aventures, trop souvent relégué à un simple divertissement pour jeunes garçons. Car sans être le moins du monde pédant, moraliste, climato-catastrophiste ou donneur de leçon, Pierre Pelot donne à réfléchir sur nos mode de vie et nos habitus de consommation en imaginant la vie dans des pays ayant subi une montée brutale du niveau des eaux, celle qu’on nous promet à terme et que ni la COP 21 ni les suivantes n’empêcheront en rien.
Avec Pierre Pelot, L’île au trésor s’offre une cure de jouvence, le roman d’aventures une crédibilité littéraire et une reconnaissance comme miroir subtil et pertinent de notre bas-monde. De l’auteur, nous avons lu également La guerre olympique, roman de science-fiction imaginant un monde où la guerre et la violence sont codifiées comme une manifestation sportive internationale, proposant une réflexion iconoclaste sur les relations humaines et sociales. Ces deux romans dénotent la personnalité forte et inclassable du romancier Pierre Pelot, un écrivain dont nous allons poursuivre l’exploration de l’oeuvre.
Philippe Rubempré
Pierre Pelot, L’île au trésor, Calmann-Lévy, 2008, 285 pages, 18 euros
Ab hinc… 190
« Pour comprendre et aimer le progrès, pour pratiquer le régime de discussion, il fallait des hommes affranchis des préoccupations vulgaires de la vie, inaccessibles aux considérations mesquines comme aux influences que subissent les ignorants et les besogneux. On ne vote selon des principes que si l’on est indépendant. » – Jacques Bainville, Histoire de France, Ch. 19- La Monarchie de Juillet
Le Grand Sud – A.D.G.
A.D.G. (pour Alain Dreux Gallou, pseudonyme d’Alain Fournier) fut à l’instar de Frédéric H. Fajardie un des grands auteurs du roman noir des années 1970. Et comme Fajardie avec Les Foulards rouges et Le Voleur de vent, il s’est essayé avec brio au roman d’aventures historique avec Le Grand Sud, fresque épique retraçant le parcours d’une poignée de forçats déportés au bagne de l’île de Nou, face à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie. Tous les ingrédients du bovarysme sont là : l’histoire de la Nouvelle-Calédonie française et du bagne, l’exotisme, l’aventure, l’amour, l’amitié, l’érotisme. Chacun des personnages de ce roman choral est campé avec justesse et crédibilité. Le cocktail final en est à la fois équilibré et détonant !
Quand Lobeau, vrai-faux dandy russe et véritable faux-monnayeur, Lizidore, jeune paysan tourangeau et braconnier, et Le Clairon, militaire pour le moins indiscipliné, débarquent après six mois de mer sur l’île de Nou, ils font connaissance avec les réjouissances du bagne et ses usages, de la hiérarchie établie au sein même de la chiourme aux punitions, du classique fouet à la crapaudine délicatement tortionnaire… Leur rivalité avec les forçats Massé et Buisson-la-Teigne, l’acharnement du gardien-chef Mattéi, la soif de liberté les poussent à tenter une évasion rocambolesque vers l’Australie, risquant les cannibales, les typhons, le naufrage… Voilà le début de l’aventure de ces antihéros magnifiques que nous suivons sur une quinzaine d’années.
Premier roman d’aventures signé A.D.G., Le Grand Sud en est, aussi et hélas, le dernier. Ce roman en appelle pourtant d’autres, ce que la vie et la maladie ne rendront pas possible. A.D.G. se joue avec délices des niveaux de langages, jonglant habilement avec le sabir administratif et l’argot des fortif’, sautant allègrement du jargon militaire au discours vindicatif et militant des communards déportés. Tout le roman est porté par le flot de l’Histoire et les vagues des histoires, retraçant quinze ans de la grande et de la petite histoire de la présence française en Nouvelle-Calédonie.
Philippe Rubempré
A.D.G., Le Grand Sud, J.C. Lattès, 1987, 545 pages, prix selon bouquiniste.
Article à retrouver sur le Salon Littéraire.
In vino veritas !
Parce que la vie, c’est le vin, vivons tant qu’il est permis d’être bien (emprunté à Pétrone et légèrement remanié). Petit florilège dédié aux amoureux de la vie…
Philosophes rêveurs qui pensez tout savoir,
Ennemis de Bacchus, rentrez dans le devoir ;
Vos esprits s’en font trop accroire.
Allez, vieux fous, allez apprendre à boire !
On est savant quand on boit bien.
Qui ne sait boire ne sait rien. – Nicolas Boileau
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L’alcoolique et l’abstinent commettent la même erreur : ils considèrent tous les deux le vin comme une drogue et non comme une boisson. – Gilbert Keith Chesterton
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Le vin console les tristes, rajeunit les vieux, soulage les déprimés du poids de leurs soucis. – Lord Byron
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Le vin est le courage, la force, la joie, l’ivresse spirituelle. Le vin a le pouvoir d’emplir l’âme en toute vérité, de tout savoir et de toute philosophie. – Bossuet
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Le vin est le professeur de goût et, en nous formant à la pratique de l’attention intérieure, il est le libérateur de l’esprit et l’illuminateur de l’intelligence. – Paul Claudel
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Le gros rouge qui tache est au Mouton-Rothschild ce que la brebis galeuse est à l’agneau pascal. – Pierre Dac
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C’est la pénicilline qui guérit les humains mais c’est le vin qui les rend heureux. – Sir Alexander Fleming
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Le vin, c’est la lumière du soleil captive dans l’eau. – Galilée
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Le vin réjouit le cœur des hommes et la joie est la mère de toutes les vertus. – Goethe
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In vino veritas, voilà un axiome qui, sans en avoir l’air, ne fait pas l’éloge des gens sobres. – Fernand Henry
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L’homme blesse ses frères. Le vin les guérit. – Hildegarde de Bingen
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Dans les pays où l’on consomme d’ardents spiritueux, le grand vice est l’ivrognerie, mais dans ceux où l’on fait du vin, il n’y a pas d’ivrognes. – Thomas Jefferson
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Le vin a métamorphosé l’Europe plus sûrement que la civilisation. – Ernst Jünger
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Non ! Le vin n’est pas une invention du diable mais un don de notre Père qui nous connaît et nous aime. – Lacordaire
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Les biens, le savoir et la gloire
N’ôtent point les soucis fâcheux ;
Et ce n’est qu’à bien boire
Que l’on peut être heureux ! – Molière, Le Bourgeois Gentilhomme
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La bouteille que tu vides, tu la remplis de ton esprit. – Gérard de Nerval
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Il y a plus de philosophie dans une bouteille de vin que dans tous les livres. – Louis Pasteur
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Le goût du vin n’est pas un crime et il en fait rarement commettre. Pour une querelle passagère qu’il cause, il forme cent attachements durables. Les buveurs ont de la cordialité, de la franchise ; ils sont presque tous bons, droits, braves et honnêtes gens. – Jean-Jacques Rousseau
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Le vin, c’est de la poésie en bouteille. – Robert Louis Stevenson
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Je suis homme et rien de ce qui touche au vin ne m’est indifférent. – Voltaire
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Les Anglais ont le pouvoir miraculeux de changer le vin en eau. – Oscar Wilde
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Rien ne grise comme le vin du malheur. – Honoré de Balzac, Splendeurs et Misères des courtisanes
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Jamais homme noble ne hait le bon vin. – Rabelais, Gargantua
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Ah ! Que j’aimais la Navarre,
Et l’amour, et le vin frais. – Paul-Jean Toulet, Les Contrerimes
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Être saoul, vous ne savez pas quelle victoire
C’est qu’on emporte sur la vie, et quel don c’est !
On oublie, on revoit, on ignore et l’on sait ;
C’est du mystère plein d’aperçus, c’est du rêve
Qui n’a jamais eu de naissance et ne s’achève
Pas, et ne se meut pas dans l’essence d’ici. – Paul Verlaine, Jadis et naguère
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Je bois… Je bois… C’est vite dit. Qu’est-ce que je bois ? Que des choses saines, que des trucs naturels ! Que du vin ! Que du Beaujolpif qu’il y a pas meilleur au corps, tous les toubibs te le diront ! Cinq, six bouteilles par jour, jamais plus. Du fortifiant. Des vitamines comme s’il en pleuvait ! – René Fallet, Le Beaujolais nouveau est arrivé
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Dieu n’avait que l’eau, mais l’homme a fait le vin. – Victor Hugo
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C’est lorsque l’ivresse n’est plus partagée qu’on devient alcoolique. – Mélanie Muller, À tout prix
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Boire du vin, c’est boire du génie. – Charles Baudelaire
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Un buveur d’eau ne sera jamais un poète. – Horace
Lectures novembre
- Dom Juan – Molière
- Situation de la France – Pierre Manent
- Nous sommes la France – Natacha Polony
- Giovanna Si! – Giovanna Casotto
- Climat investigation – Philippe Verdier
- Une élection ordinaire – Geoffroy Lejeune
- Homère, Virgile, indignez-vous ! – Thierry Grillet
- SAS. Meurtre à Athènes – Gérard de Villiers
- Boussole – Mathias Enard
- L’École est finie – Jacques Juillard
- La Marque jaune – Edgar P. Jacobs
- La culture pour qui ? Essai sur les limites de la démocratisation culturelle – Jean-Claude Wallach
- SAS. Naufrage aux Seychelles – Gérard de Villiers
- Tetfol : Les soleils perdus – Eric
- L’esprit du vin – Claude Chapuis
- L’art de la guerre – Sun Tzu
- San-Antonio chez les Mac – Frédéric Dard