Lectures mai
- Lolly Strip – Danie Dubos & Georges Pichard
- Le chercheur d’absolu – Théodore Monod
- Écrits de combat – Théodore Monod
- L’Oncle Robinson – Jules Verne
- L’Hercule sur la place – Bernard Clavel
- Et toc ! – James Hadley Chase
Monsignore – Jack-Alain Léger
Des bas-fonds de Brooklyn aux arcanes querelleuses du Vatican, Monsignore retrace l’itinéraire de John Flaherty, caïd américano-irlandais devenu cardinal. Ce parcours de vie ressemble de loin à l’itinéraire de saint-Paul de Tarse, persécuteur de chrétiens qui voit la Lumière sur le chemin de Damas et devient le plus grand et le plus talentueux prosélyte de son temps ; un dont nous pouvons – croyant ou non, le talent est athée – apprécier les nombreuses épîtres. Mais les apparences sont trompeuses. Ici, le roman de Jack-Alain Léger débute comme un thriller (comme on dit en bon français), ou plutôt comme un roman noir, sauce Chandler ou Chase.
Ce roman est remarquable par sa construction déstructurée qui ne se restructure qu’à son terme. Il est remarquable par sa plume à la fois fluide et riche ; une plume qui épouse avec justesse les situations et les personnages. Remarquable aussi les caractères, le héros qui n’en est pas vraiment un, et toute la galerie des personnages secondaires.
De Brooklyn au Vatican, de la rue au séminaire, à la guerre ou à l’église, Jack-Alain Léger dévoile les dessous d’un Vatican État, avec ses aléas de pouvoir, de jalousie, de débauche, de corruption, ses liens avec la maffia ou les dictatures en fonction de ses intérêts supérieurs au dogme. Tout du moins en réalité à défaut de l’être dans le discours.
Ce n’est pourtant pas un roman anticlérical ou une attaque en règle de l’Église catholique romaine. Déjà en 1975, on ne tire pas sur une ambulance (l’Église reprend du poil de la bête, si je puis dire, depuis quelques années, mais pas en Occident). À ce jeu là, nous pourrions considérer qu’il s’agit plutôt d’une charge contre la fragilité vénale de l’être humain. Une charge tendre et impitoyable…
Jack-Alain Léger s’est défenestré en juillet 2013. Un Grand Écrivain s’en est allé, quelles que fussent certaines polémiques à son égard.
Ab hinc… 123
« Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus au dessus d’eux l’autorité de rien ni de personne, alors c’est là en toute beauté et tout jeunesse le début de la tyrannie. » – Platon
Ab hinc… 122
« En France, tous les théâtres sont subventionnés, même ceux qui ne le sont pas » – Jean Yanne (dans Les Chinois à Paris)
L’hercule sur la place – Bernard Clavel
Avec L’hercule sur la place, Bernard Clavel nous dresse le portrait d’un bateleur, d’un lutteur de foire surnommé Kid Léon en raison de sa taille. C’est aussi et surtout l’histoire d’un Homme qui mérite une majuscule et de son Amitié, majuscule elle aussi, avec l’apprenti caïd à la noix de coco qu’il prend sous son aile.
À dire vrai, la lecture de ce beau roman rénove le regard porté, ou plutôt jeté, sur les forains en particuliers, et les gens du voyage en général. Ce n’est pas un roman moraliste, surtout pas pédagogique ou progressiste, bref, pas donneur de leçon. C’est une histoire ; la peinture d’un être bien réel que l’auteur a connu, et qu’il transcende grâce à la Littérature.
Bernard Clavel appartenait au cercle des proches de Georges Brassens. Il a d’ailleurs préfacé la biographie qu’en a signé André Tillieu (chroniqué dans ces pages). Ce n’est sans doute pas un hasard. L’hercule sur la place est un grand texte sur l’Amitié et sur le dur métier d’Homme. C’est aussi un hymne à la Liberté ; à cette liberté que Kid Léon et son acolyte se refusent à sacrifier, ni au confort ni à la sécurité. Des êtres d’une espèce rare et noble ; toujours plus noble mais de plus en plus rare…
Chronique à retrouver sur le Salon Littéraire.