Ab hinc… 235
« Une connaissance sans danger est comme une éducation sans douleur. Elle ne vous apprend rien. » – Maurice G. Dantec
Sur les chemins noirs – Sylvain Tesson
Tout est parti d’une chute. 8 mètres qui font prendre vingt ans à Sylvain Tesson. De longs mois d’hôpital et une promesse faite à lui-même : lui, le baroudeur des steppes, l’anachorète du lac Baïkal, l’aventurier insatiable, s’il remarche, traversera la France, son propre pays qu’il a trop peu exploré. Sur les chemins noirs est le récit de cette promesse tenue.
Pendant plus de trois mois, Sylvain Tesson traverse la France des chemins noirs, ces chemins perdus dans ce que l’administration appelle l’hyper-ruralité. Du Mercantour, à la frontière italienne, à la pointe du Cotentin et la Hague en passant par le Massif Central et le bocage mayennais, Un périple au coeur de la France oubliée de l’hyper-ruralité, de la France périurbaine snobée, s’attachant autant que possible à rester à l’écart des routes officielles et fréquentées, sur ces chemins noirs d’oubli et de perdition, peut-être, mais aussi chemins de beauté et de magie, de pureté encore vierge des saillies de l’aménagement du territoire… pour un temps compté, sans doute.
Dans un récit sobre et empreint de sagesse, Sylvain Tesson dresse le portrait d’une France trop souvent ignorée quand elle n’est pas méprisée, et promeut la marche comme thérapie reconstructrice de son corps abimé, bravant les séquelles physiques aux conséquences parfois cocasses – ainsi quand aux alentours de Laval, « une joggeuse opéra un demi-tour paniqué au moment où elle (le) vit« . L’auteur nous offre une nouvelle fois l’opportunité de voyager et d’admirer, de réfléchir et d’explorer. Une invitation à l’aventure, qui commence en bas de chez soi.
Philippe Rubempré
Sylvain Tesson, Sur les chemins noirs, Éditions Gallimard, 2016, 143 pages.
Ab hinc… 233
« Mais, si l’exigence d’égalité est une noble aspiration dans sa sphère propre – qui est celle de la justice sociale -, l’égalitarisme devient néfaste dans l’ordre de l’esprit, où il n’a aucune place. La démocratie est le seul système politique acceptable, mais précisément elle n’a d’application qu’en politique. Hors de son domaine propre, elle est synonyme de mort : car la vérité n’est pas démocratique, ni l’intelligence, ni la beauté, ni l’amour – ni la grâce de Dieu. (…) Une éducation vraiment démocratique est une éducation qui forme des hommes capables de défendre et de maintenir la démocratie en politique ; mais, dans son ordre à elle, qui est celui de la culture, elle est implacablement aristocratique et élitiste. » – Simon Leys
À la jeunesse
« À la jeunesse revient donc, aujourd’hui comme toujours, la tâche difficile de redécouvrir le monde, et de le renouveler, ne serait-ce qu’en portant simplement sur lui un regard neuf (…). »
Ainsi François-Xavier Bellamy présente le devoir essentiel qui échoit à la jeunesse d’aujourd’hui, comme il échut à celles d’hier et d’avant-hier. Comment la jeunesse peut-elle se réaliser et construire le monde de demain ? À elle de le dire. Ou plus exactement, à chaque jeune, à chaque adulte en devenir, de le dire et de l’écrire…
À la jeunesse propose une anthologie de discours et autres apologues destinés à cette jeunesse. De grands auteurs, comme Anatole France ou Émile Zola, de grands acteurs du monde, aussi divers que Saint-Exupéry et Barack Obama, de Lattre de Tassigny et Steve Jobs, ou Félix Éboué et Jean Jaurès, offrent à la jeunesse des clés pour déverrouiller l’avenir. Aux jeunes de se saisir ou non de ces pistes à explorer, aux jeunes de défricher ces témoignages au profit d’un monde que nous souhaitons tous, non sans une certaine candeur, meilleur.
Tel ce paladin de la Diète de Pologne cité par le maréchal de Lattre de Tassigny, souhaitons pour l’avenir une liberté dangereuse plutôt que la paix dans la servitude. La condition de l’homme est sa liberté, et la tragédie fait partie de sa condition. « Tout confort se paie. La condition d’animal domestique entraîne celle d’animal de boucherie » (Ernst Jünger). À la jeunesse d’en prendre conscience et de construire demain en Hommes libres.
Philippe Rubempré
À la jeunesse, présenté par François-Xavier Bellamy, Librio, 2016, 104 pages.