Journal d'un caféïnomane insomniaque
dimanche décembre 14th 2025

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Les enquêtes de Sam Pezzo – Giardino

sam pezzo    L’Italie a offert à la bande-dessinée quelques-unes de ses grandes signatures, de Milo Manara à Giovanna Casotto en passant par Magnus, Serpieri, Liberatore ou Guido Crepax… Vitorio Giardino n’est pas la moindre d’entre elles. L’auteur et dessinateur de Little Ego et de Max Friedman signe au début des années 1980 Les enquêtes de Sam Pezzo, publiées en édition intégrale par Glénat dans sa fameuse collection Bulle Noire à l’occasion du trentième anniversaire de la maison.

Entre Série Noire et fumetti neri, Sam Pezzo est détective privé, comme il se doit. Amateur déraisonnable de Ballantine’s et de Camel, éternellement fauché, il a l’art de récupérer les affaires les plus foireuses… Pezzo n’arrive que rarement au terme de ses enquêtes, tout du moins il n’atteint quasiment jamais son objectif initial. Détectivre hantant la faune interlope italienne de la fin des années 1970 et du début des années 1980, ses rapports avec la pègre sont souvent à ses dépens, bien qu’il y trouve de temps à autre l’occasion de se consoler dans les bras d’une petite pépée.

Travaillant en noir et blanc, Giardino confère à son anti-héros la dimension d’un Marlowe malchanceux. L’humour n’est pas absent de cette série noire à l’italienne, il découle du grotesque des situations improbables dans lesquelles Pezzo à l’art de plonger jusqu’au cou.

Avec Les enquêtes de Sam Pezzo, Vittorio Giardino nous offre une série de nouvelles graphiques au coeur glauque de la pègre et du mensonge qui raviront les amateurs du genre.

Philippe Rubempré

Vittorio Giardino, Les enquêtes de Sam Pezzo, Glénat – collection Bulle Noire, 1999, 210 pages, prix selon bouquiniste.

Retrouvez cette chronique sur le Salon Littéraire.

Les oubliés d’Annam – Lax & Giroud

annam    Plongée au coeur d’un épisode méconnu de la guerre d’Indochine, à savoir l’histoire de ces Français qui ont choisi de servir l’Oncle Hô. C’est à la recherche d’un de ces oubliés d’Annam que se lance Nico Valone, journaliste en mal de sujet à défaut d’être en mal de whisky… De Paris aux Alpes en passant par Saïgon, les fantômes du corps expéditionnaire français et des bo-doï ressurgissent, abandonnant derrière eux leur lot de cadavres. L’enquête de Nico Valone l’entraîne dans les contre-allées pas toujours propres d’un pouvoir soucieux de son image. Retrouvera-t’il le fameux Joubert, disparu en Indochine sans laisser de traces ?

Malgré une préface un tantinet trop moralisante voire repentante, Giroud offre à Lax un scénario magnifique, que nous verrions bien sous la caméra d’un Verneuil ou mieux encore, de Pierre Schondoerffer… Les auteurs ressuscitent la mémoire de ces oubliés d’Annam qui ont estimé que leur honneur était de s’engager contre leur pays, la France. Nul ne leur en a tenu rigueur après leur amnistie, et ils ont pu se réinstaller en métropole comme s’ils revenaient de vacances. D’autres, lors d’autres conflits, n’ont pas eu cette chance. Le dessin de Lax épouse parfaitement le scénario de Giroud, en véritable maître des ambiances, du Paris des manifestations contre la loi Devaquet à l’enfer vert de sang et de larmes de la Route Coloniale N°4…

Une folle enquête aux airs d’épopée, brillamment servie par un dessin intelligent et des couleurs riches de nuances.

Philippe Rubempré

Lax – Giroud, Les oubliés d’Annam – Édition intégrale, Dupuis, collection Aire Libre, 2000, 118 pages.

Le Voleur de vent – Frédéric H. Fajardie

voleur de vent    Fajardie met en scène dans une langue au classicisme fluide un héros comme nous les aimons, mystérieux, courtois, chevaleresque, habile d’armes et d’esprit… pour peu, nous en serions jaloux ! Écrite après Les Foulards rouges mais se passant avant, cette immense fresque (760 pages !) explore les arcanes d’un complot gigantesque destiné à éliminer le roi hérétique Henri IV, nombre de ligueurs n’ayant jamais cru en la sincérité de sa conversion. La conspiration, dirigée par le duc d’Épernon, est servie par un étrange moine défiguré, commandant loups-garous.

Thomas de Pomonne, comte de Nissac, amiral des Mers du Levant, s’est taillé une solide réputation de voleur de vent auprès (et à leur détriment) des Barbaresques et des Espagnols. Ne dévoilons pas le sens de l’expression « voleur de vent », laissons cette découverte aux plaisirs de la lecture… Sa réputation est telle qu’à l’instigation d’un petit évêque de Luçon (amené à connaître un grand destin ultérieurement à cette histoire), Nissac se retrouve en charge de déranger, désorganiser et amoindrir autant que possible le complot…

Frédéric H. Fajardie signe là un grand roman, bovarysant comme nous les aimons. Tout est au rendez-vous : aventure, amour, Histoire, trahison, batailles navales et terrestres, exploits, horreur, une forme de fantastique… Ce chef d’oeuvre d’une grande maîtrise est à mettre en toute les mains et confirme la place d’honneur de Frédéric H. Fajardie au panthéon des grands écrivains contemporains.

Philippe Rubempré

Frédéric H. Fajardie, Le Voleur de vent, (Jean-Claude Lattès, 2003), Le Livre de Poche, 2004, 763 pages, 8,50 euros

Retrouvez cette chronique sur le Salon Littéraire.

Ab hinc… 159

« Aucune civilisation ne s’est détruite du dehors sans s’être tout d’abord ruinée elle-même, aucun empire n’est conquis de l’extérieur, qu’il ne soit préalablement suicidé. Et une société, une civilisation, ne se détruisent de leurs propres mains que quand elles ont cessé de comprendre leurs raisons d’être, quand l’idée dominante autour de laquelle elles étaient naguère organisées leur est devenue étrangère. » – René Grousset

Ab hinc… 158

« De ce que tous les hommes sont égaux en droit, on a déduit que tous les hommes sont pareils en fait. On craint que repérer une différence, ce ne soit légitimer l’inégalité. Après tout, il y a peut-être simplement de la délicatesse à ne pas vouloir évoquer leurs infériorités mentales devant ceux qui en sont atteints. » – André Siegfried

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