Journal d'un caféïnomane insomniaque
mardi décembre 24th 2024

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Vendredi soir chez les Becker – Alain Teulié

Une demi bonne surprise à 2,99 euros dans une mauvaise solderie dont la spécialité n’est pas exactement la littérature. J’ai d’abord procédé à une recherche rapide sur l’auteur, dont j’ai notamment appris qu’il fut animateur d’une émission culturelle sur une chaîne bobo centrée. Son écriture est à l’aune de son CV. Facile voire simpliste, citant marques à la mode à s’en demander si son contrat n’est pas avec un publicitaire plutôt qu’avec un éditeur.

Sur le fond en revanche, Teulié dépeint une réalité de bobos qui se veulent moderne dans leur mode de vie et qui vont se trouver confrontés à une certaine misère qui ne fréquente lesdits bobos qu’animée de l’espoir d’acquérir les moyens de s’élever (en terme de pouvoir d’achat, il va sans dire). La description des deux profs du boulevard Raspail (Paris VI, sauf erreur), de leur rapport à l’art, à la culture, au sexe, aux classes sociales autres, est tout à fait pertinente et ne manque pas d’ironie.

Un roman à lire dans un train pour Paris, histoire de s’acclimater…

La Bonté : mode d’emploi – Nick Hornby

Roman anglais jouissif, à mettre entre les mains de toute personne à idéal de gauche, a fortiori si son idéal se reflète dans les urnes. Voilà qui remet les généreux et les altruistes « pauvrophiles » ou « faiblophiles » face à leurs convictions en introduisant le Réel dans leur quotidien.

Un couple de la quarantaine, classe moyenne pas à plaindre, deux enfants, au bord du divorce. David, le mari, rencontre dans les conditions que vous lirez un énigmatique DJ Goodnews… À la suite de quoi, il s’essaye à la bonté. Concrètement. Quand la réalité éprouve les idéaux…

Je gage qu’après cette lecture, quels que soient vos idéaux, votre regard sur la solidarité ou la générosité sera plus profond, plus nuancé. Non seulement vous allez rire, et franchement, mais vous allez vous remettre en question, remettre en question votre univers, votre environnement professionnel, familial, sociétal…

Un bon livre est un livre qui ne vous laisse pas tout à fait indemne et auquel vous revenez en y découvrant toujours quelques chose de nouveau. La Bonté : mode d’emploi est à ce titre un très bon livre, bien traduit de surcroît.

Ab hinc… 65

« Dans une société victimaire où la souffrance fait la loi, l’homme qui rit a toujours tort. Tous les hommes sont égaux, mais ceux qui n’ont pas d’humour sont plus égaux que les autres. » – David di Nota

Les chantiers d’une aventure – Michel Thiébault

Autour des Passagers du vent de François Bourgeon

Lecteurs des Passagers du vent, vous serez passionnés par cette analyse fine et richement illustrée de l’oeuvre ; vous ne connaissez pas les Passagers du vent, voici la meilleure des clés pour découvrir le chef d’oeuvre de François Bourgeon. Le travail de Michel Thiébault est exceptionnel dans le sens où il vous ouvre les portes de l’atelier du maître, de ses sources à la naissance de l’histoire, du cadre aux personnages… Et l’épopée d’Isa, du 74 canons « Le Foudroyant » à Saint-Domingue en passant par l’Angleterre ou Ouidah, est tout ce qu’il y a de plus romanesque. L’Aventure avec un A majuscule. Le lecteur ne peut être qu’en empathie avec cette jeune femme de seize ans insoumise par nécessité, attachante jusque dans ses défauts.

Une odyssée à découvrir, enrichie par l’ouvrage de Michel Thiébault, dans lequel l’érudition est un hommage à la bande-dessinée, aux auteurs (à Bourgeon), à l’aventure et à sa petite soeur l’espérance.

*****

Le travail de Thiébault se réfère aux cinq premiers tomes des Passagers du vent (vignettes ci-dessous). Bourgeon a écrit une suite en deux tomes, La petite fille Bois-Caïman, dans laquelle on retrouve Isa âgée de 98 ans.

L’Histoire de France interdite – Dimitri Casali

Pourquoi ne sommes-nous plus fiers de notre histoire ?

Voilà un essai salutaire qui enfonce des portes ouvertes pour mieux remettre les pendules à l’heure. Ne vous y trompez pas, cet incipit est flatteur. Casali ne fait que revenir à Socrate et son fameux (et putatif) « connais toi toi-même ». Il est nécessaire de se connaître, de connaître et d’assumer son histoire, sans complaisance ni autoflagellation, pour construire un avenir en commun au sein de la Nation et accepter l’Autre, l’Étranger.

Or en France, grâce à l’Éducation Nationale et ses démagogues (concepteurs des programmes, pas les profs jetés en pâture à des mômes incultes, mal-élevés et malheureusement souvent violents), soutenus vaillamment par quelques associations intéressées et populo-communautaristes, nous sommes perpétuellement dans la déconstruction de l’Histoire et des repères, dans cette seconde faute que constitue la repentance (Spinoza). Il semble que ce soit une entreprise délibérée de destruction au service d’un multiculturalisme se revendiquant de gauche, et qui ne bénéficie en réalité qu’à l’uniculturalisme mondialisé du Saint-Fric tout puissant et de l’ultra-libéralisme financier (qui n’a rien à voir avec le libéralisme politique).

Casali ne fait que remettre l’Histoire au coeur de la citoyenneté et plaide pour son retour. L’Histoire est au coeur de toute grande nation. À ce rythme, dans moins d’une génération, on parlera de la France comme d’une ancienne grande nation, une ancienne puissance politique, économique, militaire et culturelle ; crevée des suites d’un égalitarisme repentant généralisé.

Il est scientifiquement et humainement nécessaire de regarder l’Histoire en face de ce qu’elle a d’exceptionnel comme dans ce qu’elle a d’atroce. La repentance historique est une stupidité intellectuelle sans nom. C’est un concept chrétien qui s’applique à l’individu (mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa, ça ne vous parle pas ?). Par ailleurs, les générations actuelles et à venir NE SONT PAS responsables du passé. Enfin, il est complètement crétin de juger l’Histoire à l’aune de nos valeurs et de notre morale contemporaine.

Dans son essai brillant, mesuré et argumenté, étayé d’exemples flagrants et de témoignages de personnalités de référence (comme l’avocat et ancien Garde des Sceaux Badinter ou l’historien Emmanuel Le Roy Ladurie), Casali jette sa bouteille à la mer avant que la démagogie et l’inculture généralisées ne mettent un point final à ce qui fut la France.

Chronique à retrouver sur le Salon Littéraire.

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