San Antonio ou Bérurier ?
Toutes les citations suivantes sont du même auteur, mais est-il besoin de préciser lequel ?
« Dans la vie, on est toujours seul. L’important, c’est de savoir avec qui. »
« Chaque jour à vivre est une victoire. Chaque jour vécu est une défaite. »
« Le plaisir, c’est la solitude qui explose pour retomber en solitude. »
« Le sexe masculin est ce qu’il y a de plus léger au monde ; une simple pensée le soulève. »
« L’an dernier, j’étais encore un peu prétentieux ; cette année, je suis parfait. »
« L’amour, on s’enlace. »
« La plus haute marque de respect qu’on puisse témoigner à une femme, c’est de la faire jouir. »
« Un homme intelligent n’est pas autre chose qu’un con raté. »
« Rien n’est plus fort que le mutisme, quand on a quelque chose d’important à dire. »
« La larme est la goutte d’eau qui fait déborder l’âme. »
« Soyez cons en silence, c’est la moindre des politesses. »
« Le vrai tombeau des morts est dans le coeur des vivants. »
Fleur – Park KUN-WOONG
Attention, chef d’oeuvre !
Ce manwa (bande dessinée coréenne – ndr) est une véritable oeuvre romanesque et historique. Car si l’auteur use de la fiction et du dessin, il ne trahit en rien les événements. Ainsi, sur près de 1 500 pages époustouflantes, le lecteur revit la tragédie coréenne de l’invasion japonaise à la partition Nord / Sud, au travers du parcours de Jaeng-Tchao, luttant aux côtés des communistes plus par dégout de la violence commise par les soldats du Sud que par conviction idéologique.
Il faut souligner aussi la qualité exceptionnelle du dessin, de l’expression des visages, de l’incarnation des sentiments, de la restitution de l’horreur inhérente à toute guerre, civile ou non. Le jeu des couleurs est d’une pertinence surprenante, jonglant du noir et blanc pur au spectre des couleurs les plus vives. Il est singulièrement fort quand l’auteur n’utilise que quelques touches de couleur au sein de planches d’un noir et blanc sinistre et justifié.
Bref, bédéphile, amateur d’histoire, lecteur de romans, ami lambda, à tous comme à chacun je recommande plus que vivement la lecture de ce chef d’oeuvre en 3 tomes. (Non, tout ne se vaut pas, et j’affirme ici que Fleur est un chef d’oeuvre, en espérant sans trop d’appréhension que ce sera toujours le cas après ma disparition).
Zone – Mathias ÉNARD
Si d’aucun s’imaginaient que tout avait été écrit en matière littéraire (je veux parler d’écriture), Mathias Énard les renvoie dans leurs plates-bandes avec Zone. 500 pages au fil du cerveau de Francis Servain Mirkovic, comme un encéphalogramme qui transcrirait en mots les signaux électriques transmis par les électrodes placées sur un cerveau.
500 pages, et pour ainsi dire, une phrase, avec une majuscule au début, un point final. 3 incartades cependant, quand le héros lit, nous lisons avec lui, et l’ouvrage est ponctué.
Roman magistral, d’une actualité étouffante, d’une richesse historique impressionnante. L’érudition pour l’érudition donne souvent des pavés illisibles. ici, il n’en est rien. L’érudition et l’innovation littéraire au service d’une intrigue romanesque simple et diablement efficace, voilà le secret de Zone.
Je ne raconterai pas l’histoire, je ne m’amuserai pas à essayer un résumé, simplement poser la situation : après avoir loupé son avion, Francis Servain Mirkovic se retrouve dans un train pour un voyage de 15 heures. Mathias Énard nous offre le fil des pensées de ce barbouze à la vie professionnelle et sentimentale mouvementée, en proie à un questionnement interne qui interroge chacun d’entre nous.
Il faut le dire, dans la jungle de l’édition contemporaine française poussent des perles. Zone en est une.
La 27e Lettre – WILL & DESBERG
Etre élevé dans un bordel berlinois dans les années 1920-1930… et finir dans un camp de concentration… la sinistre 27e lettre…
Voici racontée la vie de notre héros, Fred, de sa première à sa seconde dizaine.
Eduqué grâce aux livres empruntés aux éminents professeurs fréquentant le claque devenu familial, Fred devient un esprit libre, couvé par des prostituées et amoureux d’une Tzigane. Pas forcément une bonne idée à l’heure de l’avènement d’un certain moustachu autrichien de taille modeste. Sans en être conscient, Fred va résister, de la plus belle manière qui soit, en continuant à vivre, aimer et espérer.
Une bande-dessinée sublime, féroce et tendre, un hymne à la liberté, à la liberté et à la femme.
Par les auteurs de Tiff & Tondu (sic !)
Dessins de Will – Scénario de Desberg – (Chronique rédigée à la brasserie Le Rond-Point au verso de l’addition)
Fleur d’août – Laura DESPREIN
… où le songe d’une vie d’été…
Pour son second roman, Laura Desprein nous offre la dolce vita façon contes cruels… pas si cruels finalement. Après Braise, un premier roman réussi (chroniqué également sur librairtaire.fr), l’auteure poursuit son écriture de la Femme, va plus avant, ose, invente et réinvente la langue pour nous raconter le parcours de Tina, ses maris, ses amants aussi, les enfants, son enfance. Déjà lu, déjà vu, je vous entends, oiseau de mauvais augure! Eh bien pas du tout.
Un érotisme féminin affleure tout au long de ce court roman sans se manifester vraiment. Les thèmes de la vieillesse, de la grossesse, de la femme et de la mère, de l’amour et de la jalousie animent le texte. Le lecteur s’identifie au personnage de Tina, embrasse ses états d’âme. Sans doute Laura Desprein transcende par sa plume vive et joyeuse ses questionnements intimes.
Ce nouveau roman de Laura Desprein s’inscrit naturellement dans l’oeuvre de l’auteure, sans pour autant être une suite à Braise. C’est une oeuvre romanesque qui se dévore. C’est une oeuvre sur la féminité qui s’adore.
Un second roman sensuel et sensible d’une jeune auteure qui gagne à écrire. Vivement le prochain!