Journal d'un caféïnomane insomniaque
samedi juillet 27th 2024

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La gueule du lion – J. CHRISTOPHE

Roman d’aventures, roman d’amitié, roman initiatique pour les jeunes garçons (et filles) en pleine construction de leur personnalité.

Italie du Nord, première moitié du XVIeme Siècle. Bernard, fils d’un soldat français et d’une Italienne du cru, perd tout, volé par des crèvent-la-dalle. Sa mère n’y survit pas. Il a 14 ans. Il a un objectif : rejoindre la Sérénissime, où il sera en sécurité, et où il pourra gagner sa vie en travaillant à l’arsenal. Il se joint à la bande d’affamés et plonge vers son destin. Il va croiser Federigo, fils d’un orfèvre vénitien. De cette rencontre naît une amitié et une fidélité, un certain sens de l’honneur célébré tout au long de ce court roman pour la jeunesse.

Le roman est magnifiquement illustré par des peintures (et détails) vénitiennes dans une reproduction couleur de qualité, à l’honneur de l’éditeur, la Bibliothèque de l’Amitié, ainsi que par un semis de dessins signés Boudignon appuyant le texte.

Le roman s’inscrit dans son époque (il a été publié en 1971), ne l’oublions pas avant d’en juger les thèmes à l’emporte-pièce. C’est une belle introduction à ce qu’est l’amitié, la vraie, celle avec un grand A comme A la vie, A la mort…

Des néons sous la mer – Frédéric CIRIEZ

Jouissif ! Et je ne l’écris pas en raison du thème du roman, la prostitution. Non, c’est vraiment jouissif grâce à la langue agile de l’auteur. C’est ingénieux, inventif, inattendu, osé, exagéré… du point de vue de l’écriture. C’est un feu d’artifice de singularités, toutes et chacune étant justifiée(s) par les besoins de la narration.

Nous sommes en 2012, après l’élection présidentielle. La prostitution est légalisée. Sic ! Un claque s’est ouvert dans un ancien sous-marin (diesel) de la Royale (marine française) à la réputation sulfureuse (le sous-marin). Il est du côté de Paimpol. Le lupanar est presqu’anagramiquement dénommé Olaimp (toute référence à Manet et à la mythologie étant purement non-fortuite).

Écoutons, lisons le vestiaire des lieux nous raconter ce boxon qui rime avec émotion autant qu’avec prostitution.

Ce roman a du fond. Il aborde sous un extérieur plaisant, littéraire, drolatique, la très épineuse question de la prostitution. Avec, il faut le reconnaître, une grande lucidité. Et l’intelligence de ne pas juger.

Le roman milite-t-il pour la réouverture des bordels et la légalisation de la prostitution ? Lisez-le, faites votre opinion propre. Quoi qu’il en soit, c’est remarquablement écrit du point de vue langue et littérature ; l’histoire est impeccable du point de vue roman ; le fond est bien présent pour susciter la réflexion.

Pour un premier roman, brillant, et … Chapeau !

En poche chez Folio

100 plus beaux musées du monde – Ed. Gründ

Intituler son livre les 100 plus beaux musées du monde et ne pas y faire figurer le Getty Center de Los Angeles… ça décrédibilise dès le départ ! Ami amateur d’art, tu n’apprendras pas grand chose, voire rien du tout, en découvrant ce livre.

Comme son titre l’indique, c’est un tour du monde des musées, avec pour chacun une courte notice résumant son origine, son histoire et citant les principales oeuvres exposées. Très intéressant si vous souhaitez vous adonner au tourisme culturel.

Je reproche à ce bouquin (beau bouquin, soyons honnête) d’être un coup d’éditeur, un piège à touriste, certainement publié en amont de quelque fête à cadeaux. D’ailleurs, difficile de savoir qui sont les rédacteurs du comité éditorial. Sont-ce des historiens d’art ? des muséographes ? des journalistes ? des rédacteurs à la sauce verte Michelin ? Nous connaissons le nom du traducteur, c’est déjà ça.

Je ne suis pas là pour faire la pute, ni pour descendre le bouquin, et si je vous en parle, c’est que j’ai pris un certain plaisir (voire un plaisir certain) à le lire. Ça se lit comme une bande-dessinée. Les notices, pour être légères, n’en sont pas moins relativement bien rédigées, d’accès facile (ce qui semble logique dans un ouvrage de vulgarisation).

La très grande qualité de cet ouvrage reste la reproduction des oeuvres. Il a été fait le choix très judicieux de ne pas chercher à reproduire un maximum d’oeuvres et de préférence les plus connues. Au contraire, les oeuvres reproduites ont été soigneusement choisies ; elles sont représentatives de l’âme des musées visités, et la « célébrité » des oeuvres montrées a laissé la place à la qualité des oeuvres in situ. Enfin, et j’en termine là, c’est un vrai plaisir d’admirer la qualité des reproductions et de l’impression.

Un livre de vulgarisation, léger sur le fond, insuffisant voire inexistant en art, mais plaisant tout de même car de lecture aisée, divertissante et grâce à une iconographie judicieuse et de grande qualité.

JANUS – t1 : La compagnie des ombres

Dessin : Régis VAN WINSEN – Scénario : Virginie CADY – Couleur : Abel ORAIN

Pauvre Léopold de Gygès ! Quel mal lui a pris de participer à une séance de spiritisme chez la mystérieuse comtesse Sokorowska ! Le voilà affublé d’un fantomatique et renaissant alter ego… bien trop agité à son goût ! Bondissant, bagarreur et coureur, infatigable avec ça!

De quoi dynamiter le paisible quotidien tendance bridge et mondanités d’un noble parisien de la Belle Époque. Jusqu’au jour où… Gygès apprend que ce double fantomatique est le fruit d’un appel de l’énigmatique comtesse. Pourquoi ? Léopold en acceptera-t-il les enjeux? Aura-t-il le choix ?

Et voilà une plaisante aventure qui démarre en trombe dans le Paris de la Belle Époque, sublimé par les dessins de Régis van Winsen et les couleurs d’Orain (je pourrais rester indéfiniment devant certaines cases dont le dessin et l’ambiance me font péter la machine à bovaryser). Le scénario est extrêmement bien ficelé, les dialogues pleins d’humour.

Un tome à ce jour (sauf erreur de ma part), paru chez Nuclea, maison qui requiescat in pace (sauf erreur 2 de ma part). En espérant qu’un éditeur avisé se risque pour notre bonheur à publier la suite des aventures de Gygès…

(Et Janus dans tout ça, me direz-vous ? Lisez le tome 1 et priez pour la suite…)


Kaputt – Curzio MALAPARTE

Malaparte, après quelques ennuis avec les autorités fascistes, fut officier italien sur différents fronts à l’Est, pendant la dernière Guerre mondiale. Détaché auprès des Allemands. Kaputt, c’est le récit de sa guerre.

Ce qui frappe ce sont les odeurs. Elles sont âpres, elles décantent de putréfaction et de poudre. Malaparte écrit beaucoup sur les odeurs, et les odeurs vous prennent à la gorge. Inextricablement vissées à votre larynx. Suffocantes.

Pourtant j’ai le sentiment que Malaparte narre son expérience comme une maman raconte une histoire à son gamin pour l’endormir. Je veux dire dans la manière, pas sur le fond. Et l’horreur de ce qui est raconté n’en est que plus dérangeante. Terrible comme un coup de massue asséné par traitrise.

Malaparte raconte sa guerre, telle qu’il l’a vécue. Elle est omniprésente et quelque part, il n’en est jamais question.Tous les personnages (historiques) croisés sont ambigus (parce que dans la vie le manichéisme n’est qu’une théorie). La sensation de dégoût profond et d’horreur n’en est que plus forte (je pense au GeneralGouverneur de Pologne Franck).

Bref, je ne m’étends pas. D’autres ont décortiqué, étudié, analysé l’oeuvre de Curzio Malaparte mieux que moi. Mais cette oeuvre me marquera à jamais, et je tenais à en partager les raisons.

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