Journal d'un caféïnomane insomniaque
dimanche septembre 8th 2024

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Le Beaujolais nouveau est arrivé – René FALLET

René Fallet aurait-il pu publier Le Beaujolais nouveau est arrivé en 2010 sans risquer les foudres des ayatollahs de la santé et des hypocrites (crates?) du conseil de l’ordre et du ministère? Il est vrai que le jaja et le picrate n’ont plus la cote de nos jours où l’objectif unique semble être de crever en bonne santé. Enfin, brisons là sur le sujet, en matière de santé comme pour le reste, appelons une figure de référence en la personne d’Arthur Rimbaud, « la morale est une maladie de l’âme ».

Il n’en reste pas moins un roman formidable sur l’amitié, sur le vin, sur l’humanité. Une ville de banlieue, banlieue rouge comme le suggère les noms des rues, un bistrot, un vrai, le bistrot du coin de la rue, celui des copains et des habitués, avec son lot d’ivrognes et de philosophie. Toute la vie est organisée autour du bistrot, boire le pot de l’amitié, l’apéro, un coup d’Beaujolpif avec les potos, voilà le sacré de la vie, l’amitié, l’amitié et le vin qui célèbre l’amitié.

Et voilà novembre avec l’arrivée du Beaujolais nouveau. Oh certes , c’est pas un grand cru bourgeois, mais c’est pas ce qu’on lui demande au Beaujolais nouveau. Un vin frais, léger, un vin de soif à partager entre potes… entre Captain Beaujol, Paulo Debedeux, Poulouc et Camadule, les quatre comparses aux aventures éthyliques pleines d’humour et d’humanité.

Le roman est admirablement servi par l’écriture de Fallet (qui fut l’ami de Brassens dont il a signé une biographie et critique littéraire au Canard Enchaîné), plume truculente, périlleuse, sauvage, débordante d’inventivité, riche du langage des bistrots et des trouvailles sémantiques des poivrots.

Ça fait du bien de lire ça aujourd’hui, vraiment, c’est réconfortant sur l’humanité, l’amitié et bien entendu, le vin.

Chronique à retrouver sur le Salon Littéraire.

Histoire de France – SAN ANTONIO

Pour tous les réfractaires à l’histoire, tous les sportifs et les pragmatiques-qui-pensent-que-la-réussite-c-est-le-fric-et-rien-d-autre, voilà la meilleure initiation à l’histoire de notre France, cette longue et passionnante évolution qui permet aux sus-nommés de la parasiter en toute tranquillité.

De Vercingétorix à De Gaulle, le commissaire tringleur pose pour l’inénarrable Bérurier les jalons essentiels qui fondent notre contrat social. Outre la langue de Frédéric Dard – c’est une langue à part entière – l’ouvrage offre quelques pages précieuses, comme celles où le Gravos nous explique sa vision du Grand Paris, à faire pâlir de jalousie Bertrand Delanoë et Christian Blanc (qui ne manquerait pas d’avaler sa chique cubaine de travers).

Une lecture jouissive pour se culturer en se distraisant ! Je laisse le mot de la fin au commissaire San Frédéric Antonio Dard, qui constate avec justesse que qui que l’on soit, d’où que l’on vienne, quelque part,

NOUS SOMMES TOUS DES BÉRURIER !

Editions Fleuve Noir

La correction ou la confusion des sens – Philippe de SAXE, illustrations d’Alex VARENNE

Un ouvrage bien troublant… Tout d’abord par son écriture. Cela saute aux yeux et interpelle dès la première page. Alternance de paragraphes en capitales d’imprimerie et de paragraphes en italique. Deux écritures, deux polices, deux narrateurs, trois lectures…

Un homme lit ce qu’on pourrait qualifier de « journal intime ». Ecrit par une ancienne compagne, l’homme en rédige un commentaire au fur et à mesure. D’où les deux écritures, les deux polices, les deux narrateurs, les trois lectures… Au choix du lecteur le journal intime de la femme, les commentaires de l’homme ou le dialogue entre les deux. Mon choix fut la troisième option. Il serait intéressant certainement de réécrire cette chronique après avoir exploré chacune des deux autres directions…

Le texte est très bien écrit, il ne correspond pas aux poncifs de la littérature érotique (celle dont on dit qu’elle se lit à une main, de préférence la gauche) ni par la qualité de sa syntaxe, ni par la recherche et le niveau du vocabulaire. La lecture offre une réelle cohérence pour chacune des plumes s’exprimant dans ce roman, et le dialogue s’instaurant entre les deux protagonistes par encre interposée n’en prend que plus de piquant. Au fil des pages se construit petit à petit la relation entre ses deux êtres que rien ne lie hormis le désir et la passion physique. Le roman s’engage dans une véritable fuite en avant, entrainant son lecteur dans une fascination / répulsion face au caractère exponentiel de la relation sexuelle et physique qui unit cette femme et cet homme. Plongée dans un univers sadomasochiste, mais à la manière d’un roman d’initiation, tel que l’on peut l’entendre pour des romans destinés à éduquer (ici les adultes, cela va sans dire). Le malaise transpire dans le titre, La correction ou la confusion des sens. Le lecteur est placé à la fois en voyeur qui découvre l’échange existant au sein de ce couple à travers leur dialogue et les illustrations d’Alex Varenne – d’un noir & blanc bienvenu – mais aussi quelque part en acteur malgré lui de cette relation, car  lisant ces carnets intimes, il lit « je ».

Le talent de Varenne suggère quelques instantanés de cette relation trouble. Son trait, ou plus exactement, l’ambiance générale résultant à la fois du trait et du traitement N&B, rappelle une ambiance berlinoise des années 1920, entre esthétisme, fétichisme et érotisme.

Un ouvrage bien troublant…

Le goût du péché – ESPARBEC

Esparbec. Illustre nom parmi les amateurs d’érotisme, quoique l’auteur se revendique pornographe. Et moi qui ne suis encore rien, j’ose le contester. A ce niveau de langage et avec cette qualité d’écriture, il ne saurait à mon sens être question de pornographie.

Papa est rentré à Paris, pour ses affaires. Nellie et Maman restées en Normandie, villégiature à l’hôtel. Pas drôle quand le ciel est si bas qu’il suffit de lever la main pour touche l’éternité… Et voilà le récit croisé – joliment narré par l’ingénue Nellie – de la découverte de la vie par une gente demoiselle, aux prises par ailleurs avec la débauche – j’emploie le terme à dessein pour décourager les bigots de lire cet ouvrage et prévenir leur tentation de le faire interdire – de sa mère, Meg.

Lecture à une main par excellence, qu’on soit Femme ou homme, le roman n’en est pas moins d’un style remarquable, et la vulgarité comme la grossièreté en sont absentes. Amis branleurs, là encore, passez votre chemin et retournez chez Dorcel.

Une détente pour adulte tout à fait agréable, la qualité littéraire n’enlevant rien au plaisir de l’érotomane.

Editions La Musardine

Les aventures de la Chevalière – André Hodeir

Les aventures de la Chevalière
La Chevalière et le panache blanc

Deux romans d’aventure pour la jeunesse – ou plus exactement un roman en deux tomes – du jazzman André Hodeir. Une de mes oeuvres cultes!! J’y reviens régulièrement, et la pauvre couverture glacée semi-rigide de l’édition l’Ami de Poche Casterman de 1983 commence à sérieusement m’en vouloir!

Voilà la vie de la jeune Ermengarde, depuis ses 12 ans, âge auquel elle réussit l’exploit de concourir au tournoi d’escrime organisé par Charles IX, jusqu’à ses 25 ou 26 ans, une fois Henri de Navarre devenu effectivement roi de France, après avoir vaincu la Ligue, sous le nom de Henri IV. Une extraordinaire plongée au coeur des Guerres de Religion, de la chute de la dynastie des Valois et de l’avènement des Bourbons. Accompagnons donc la Petite Chevalière, invitée surprise d’une joute royale, parpaillote dévouée à la cause du Navarrais. Regardons la affronter, admirer, combattre, défendre ou cotoyer les personnages historiques de l’époque – de Charles IX à Henri IV en passant par les Guise, Lorraine, Coligny ou la Médicis, j’en passe et des meilleurs – et les personnages fruits de l’imagination fertile et géniale du jazzman, à commencer par l’inénarrable baron de l’Escalope, dont le nom à lui seul est tout un poème…

Ce bouquin est juste formidable, à la fois instructif et passionnant, rythmé, plein d’humour… BOVARYSANT! (au sens où en le lisant vous le vivez, à tel point que je ne vous en conseille pas la lecture dans une maison en feu, n’étant pas certain que vous réalisiez l’imminence de la catastrophe avant qu’il ne soit trop tard!).

A lire, parents, enfants, amis, de 7 à 77 ans et plus si affinités!

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